QUE NOUS RÉSERVE 2015 ? COUPLE

QUEL AVENIR POUR LA DRAGUE EN LIGNE ?

Après les sites de rencontres pour personnes intolérantes au gluten ou ceux réservés aux amateurs de zombies, que reste-t-il encore à inventer pour aider les célibataires à trouver l’âme sœur ou improviser une belle nuit de folie ? Oubliez la géolocalisation à la Tinder, le prochain truc de l’heure sera la sociolocalisation : l’art de trouver les célibataires à quelques degrés de séparation. Cinq trucs à surveiller cette année dans le merveilleux monde de la drague online.

LES AMIS DE MES AMIS

C’est vieux comme le monde. LE truc le mieux coté pour trouver un partenaire, même carrément se marier, fait valoir Jeffrey Hall, l’auteur de The Five Flirting Styles. En effet, « 17 % des gens qui se sont mariés au cours des 10 dernières années aux États-Unis se sont rencontrés par l’entremise d’un ami, fait-il valoir. Les gens ont confiance quand on leur présente des amis, dit-il. Cela a beaucoup de potentiel. »

Si les Tinder et OK Cupid de ce monde permettent déjà de s’inscrire par l’entremise de Facebook (et donc de voir les différents amis et champs d’intérêt en commun), l’expert en amitié, amour et drague en ligne entrevoit une application qui nous mettrait directement en contact avec les amis d’amis célibataires, que ceux-ci soient inscrits sur un site de rencontres ou non, en relevant ceux dont le niveau de scolarité, l’âge, les champs d’intérêt et, pourquoi pas, le parcours de vie sont similaires. Bref, en relevant une éventuelle compatibilité. Creepy, dites-vous ? « Franchement ? Tout est un peu creepy. Mais est-ce que Tinder est moins creepy ? Les gens acceptent ce degré de creepytude ! »

L’ART DE LA FORMULE

Qu’on se le dise : en ligne, souvent, c’est le verbe qui permet de se démarquer des quelques milliers d’autres candidats potentiels. Car tout le monde affirme avoir une vie trépidante, aimer les bonnes bouffes et le bon vin entre amis. Parfois, ils le disent bien. Parfois, drôlement moins (« Certains ont l’air d’avoir créé leur profil vite fait en voiture sur leur cell, sans la moindre ponctuation, majuscule, etc. Non, mais, ayez la décence de vous faire corriger ! », signale, mi-amusée, mi-désespérée, une utilisatrice). Guillaume Dumas a flairé ici un filon et propose d’ailleurs, depuis un an, un service d’ « assistance à la séduction » (Datective.ca), où il s’occupe de créer le profil, de gérer les conversations et même de fixer les rendez-vous des célibataires trop occupés (ou analphabètes). Le service est loin d’être donné (les forfaits se comptent en centaines de dollars), mais s’il y a une offre, c’est qu’il y a visiblement une demande. « Tout le monde est pareil sur ces sites. Il faut savoir se démarquer. Comprendre ce qui fait rire les femmes, moi, je fais ça 40 heures par semaine, alors c’est sûr que j’ai un peu d’avance ! », poursuit cet « aspirant Cyrano » du web. 

ET LA TENDRESSE, BORDEL ?

Vrai, les applications de rencontres souffrent toujours d’une piètre réputation. Pour cause. Souvent, tout cela sent drôlement le meat market, confie un fidèle utilisateur. Surtout quand certains se présentent en « chest huilé, le coude sur le hood de char » (signale une autre), ou en bikini sur leur moto. Ce qui est déjà mieux, cela dit, qu’un vulgaire égoportrait devant un miroir, à côté d’un panier de linge sale qui déborde. Ou, pire, la photo datée et découpée, avec le bras de l’ex qui dépasse. Vu et revu. Mais on s’éloigne ici du sujet. Non, les utilisateurs ne cherchent pas tous ici des histoires d’un soir. Que dire du grand besoin de tendresse des célibataires ? Un utilisateur a confié rêver carrément du prochain « Tender », « pour trouver quelqu’un juste pour dormir collé ».  Selon le chercheur Jeffrey Hall, de plus en plus d’usagers utilisent d’ailleurs Tinder à des fins plus larges, notamment pour faire des rencontres sociales, voire amoureuses. D’où les fameux « Et plus, si affinités » et « Recherche quelqu’un au passé réglé », qui ressurgissent régulièrement.

JE M’ASSUME, MOI NON PLUS

Lu, sur le profil d’un joli candidat, sur un site de rencontres québécois : « Je promets de mentir sur l’outil de notre rencontre. » Peu de gens, à ce jour, se vantent d’avoir rencontré leur tendre moitié sur Réseau contact, encore moins par l’entremise d’une application mobile à la Tinder. D’après les sondages, si l’utilisation de sites de rencontres commence tranquillement à entrer dans les mœurs, il n’en est pas de même pour les applications de géolocalisation, lesquelles permettent de magasiner des célibataires selon un périmètre géographique donné. Il faut dire que Tinder (mais il en existe plein d’autres, que ce soit Grindr ou Brenda) est encore tout jeune, né il y a deux ans à peine. « Cela va prendre du temps. Il va falloir que les gens aient suffisamment de rencontres positives, sécuritaires pour que l’on réalise que ça n’est pas si mal », croit le professeur de communications de l’Université du Kansas Jeffrey Hall. Trop de gens pensent encore que ces applications ne servent qu’à faire des rencontres d’un soir. « Or ce n’est plus ce que la grande majorité des utilisateurs recherchent avec ces applications. »

LE RETOUR DE LA DRAGUE LIVE ?

N’empêche que de nombreux utilisateurs sortent déçus de leur expérience en ligne. Parce que cela coûte cher, en temps surtout, que les déceptions sont nombreuses (« Des fois, on t’écrit et c’est carrément dur pour l’ego ! Il me semble que je ne suis pas si mal que ça ! », rit encore une jeune et jolie utilisatrice, après avoir reçu le message d’un « super sexagénaire en kit d’aluminium aux cheveux longs et gras »), et les rencontres, finalement, souvent peu concluantes (« Une fille m’a déjà donné un rendez-vous sur Skype, et après dix minutes d’entretien, elle se masturbait. Finalement, elle n’était qu’exhibitionniste ! », pouffe un autre, qui s’est en prime fait interpeller par deux gais et deux femmes très âgées). « Peut-être que les moyens traditionnels vont revenir à la mode, suppute quant à elle la psychologue Marika Jauron, qui a fait un doctorat sur les rencontres amoureuses par l’entremise de l’internet en 2010. Peut-être qu’on va laisser faire les textos et la technologie et miser sur les rencontres face à face ? Parfois, j’entends tellement de déceptions, à la suite de ces rencontres basées uniquement sur le physique et le superficiel. » À suivre…

USAGE : 

11 % des Américains (et 38 % des célibataires) ont déjà utilisé un site ou une application de rencontres

66 % des usagers sont déjà sortis avec quelqu’un rencontré en ligne

23 % des usagers ont eu une relation de longue durée avec quelqu’un rencontré en ligne

POPULARITÉ : 

59 % des usagers de l’internet affirment que le web est un bon moyen de faire des rencontres (un chiffre en hausse de 15 points depuis 2005)

53 % des usagers de l’internet affirment que les rencontres en ligne permettent de trouver de meilleurs « matchs » (un chiffre en hausse de six points depuis 2005)

21 % des usagers de l’internet affirment que les rencontres en ligne sont pour les désespérés (un chiffre en baisse de 8 points depuis 2005)

SOURCE : PEW RESEARCH CENTER, 2013

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